Libérer la parole qui est en nous

« En Afrique, toute assemblée a ses lois, la palabre a les siennes ; elles sont simples. Chacun à son tour est invité à s’exprimer ; tous ont le devoir d’écouter jusqu’au bout, sans interrompre ; nul n’est laissé pour compte. Il n’est pas nécessaire qu’un jugement soit porté. Après avoir siégé, tous peuvent repartir en paix, un pas est franchi. »
Règle n°1 : liberté de propos
Règle n°2 : bienveillance, écoute et respect
Règle n°3 : égalité de tous devant la question humaine.
Autant de valeurs que je souhaite vous faire partager à travers ce blog et avec l’aide de toutes vos contributions !

jeudi 30 janvier 2014

Le 10 Janvier au BENIN : UNE EPIPHANIE PROLONGEE ?

Il est des dates qui sonnent comme des indicateurs, des rappels  ou des interpellations.
Le 10 janvier dernier, le Séminaire St Joseph  de Misserete dans le diocèse de Porto-Novo célébrait le 25e anniversaire de sa fondation en réunissant un colloque particulièrement significatif sur le thème : « Formation au sacerdoce en contexte d’inter culturalité pour une nouvelle évangélisation »

Le séminaire de Misserete  est un centre de discernement, de formation  humaine et d’approfondissement spirituel avant l’engagement libre sur le chemin du sacerdoce .Il est un séminaire propédeutique dont le premier Recteur fut Mgr Barthélémy Adoukonou, aujourd’hui, en service à Rome dans l’importante fonction de Secrétaire de la Commission Pontificale pour la culture.

Ce même 10 janvier rappelle, dans l’Eglise du Benin, le jour de naissance  de Mgr François Steinmetz, longtemps Vicaire apostolique  du Dahomey  avec siège  à Ouidah où il entretint des rapports très cordiaux avec les hauts responsables des religions traditionnelles.  C’est à lui que revient le mérite d’avoir créé le Séminaire  devenu Séminaire St Galll, aujourd’hui centenaire ! Son confrère Francis Aupiais  est resté dans toutes les mémoires pour avoir introduit à Porto- Novo la grande joie de l’Epiphanie, révélation à tous les univers  de l’apparition du signe et de la réalité du salut. «  Beaucoup viendront de l’Orient … »

Alors, ce 10 janvier 2014 date à laquelle, à l’invitation très appropriée  du Père Jacob Affognon , Mgr Jean –Benoit Gnambode , administrateur apostolique , ouvre le colloque international de Misserete en nous  appelant  à « immoler nos volontés »  pour découvrir « à travers les signes des temps  la présence active du Tout-puissant »,  nous avons eu la chance  d’être conviés  par le Nonce Apostolique, Mgr Brian Udaigwe,  à nous élever  à « l’audace    prophétique  » ..

La date du 10 janvier  précisément la suggère puisque très officiellement  chez nous depuis  Nicéphore Soglo  c’est le jour de la fête des religions traditionnelles que les médias de tous bords au Benin et surtout en Europe et aux Amériques   ont proclamé la fête du Vaudoun. Rien de plus sommaire !  

Le temps est venu de dire le juste et le vrai et de rétablir le  sens et la dignité  d’un geste prophétique.
La décision du gouvernement n’est pas de célébrer la fête du Vaudoun  mais de donner aux religions traditionnelles ou endogènes un caractère de reconnaissance officielle qui manquait et qui désormais permet d’élargir l’espace d’adoration du Dieu vrai, unique et tout-puissant. C’est « MAHOU  », reconnu « Absolu suprême et commun »  en toutes langues de notre univers national.

Le 10 janvier, c’est donc, au Benin,  fête du Dieu  unique,   créateur de la vie  et  de toutes choses, célébré glorieusement par les religions traditionnelles répandues  à travers le pays, y compris celles se référant à une force spécifique appelée « Vaudoun » avec ses particularités de culte et de comportement social.

Il y a  ici, malgré nos fortes différences, une chance et une grâce que nous devrions savoir discerner et magnifier.
Dans cette perspective, on trouverait  peut-être très approprié d’intégrer et d’élargir   notre espérance dans « la foi d’Abraham, père des croyants » ! Il serait peut-être aussi  pertinent et judicieux de saisir l’occasion de ce 10 Janvier pour accueillir les adultes appelés au baptême, eux qui auront aperçu « une grande lumière » et auront su  marcher vers elle. Ainsi se dégagerait   un espace  largement  ouvert  à la nouvelle évangélisation et que Mgr Adoukonou  au colloque de Misserete, a dépeint avec une  sincère audace.

Les prêtres répondant  aux exigences culturelles de cet apostolat « requièrent une formation  particulière  » toujours  en construction. Madame Marguerite Lena, professeur de philosophie, qui depuis plus de quarante ans participe à l’effort de formation des prêtres  dans le diocèse de Paris, a superbement renforcé ce désir d’approfondissement des voies de la qualité du don  de soi au service d’un Jésus- Christ  qui ne se laisse appréhender que dans la nudité du  sanctuaire  de la conscience personnelle.

Cette conscience que réveillent  les chemins de l’Epiphanie  a déjà  secoué l’histoire de l’humanité  dans des mondes où  les hommes  n’ont pas su discerner le doigt  de Dieu  comme me le suggère  cet ami prêtre jésuite que la Providence a généreusement  mis sur ma route .Denis Maugenest  ,informé de la réflexion que voici , me rappelle en effet que bien des tragédies eussent pu être évitées si pendant la Révolution française  on avait mieux cerné les révélations cachées dans le clair obscur des mots et des  symboles  et il rappelle  la déclaration des droits de l’homme datant de cette époque :
«  Les représentants du peuple français, constitués en Assemblée nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs…

En conséquence, l'Assemblée nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Etre Suprême, les droits suivants de l'homme et du citoyen :
 1. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune… » …
A cette charte  des révolutionnaires, fort malheureusement, on voulut, me dit mon ami jésuite, opposer – jusqu’au Concile Vatican II… - les droits de Dieu ! « Comme si cette opposition était la vérité  à proclamer, au lieu de celle de l’alliance entre Dieu et l’Homme, celui-ci fait à l’image de celui-là, ‘Fils de Dieu’, ‘Dieu fait Homme’… C’est tout le mystère de l’Incarnation qui s’en trouvait remis en cause, au profit de tous les systèmes sociaux possibles d’inégalité, de domination et d’esclavage entre les humains, » avec les conséquences que l’on sait !

Nous sommes donc appelés d’’urgence  à promouvoir «  la conscience en action  » pour éviter les tragédies d’hier et  prévenir celles qui menacent,  par un dialogue interreligieux intelligent et sincère .L’actualité le commande. Notre foi l’inspire et l’encourage.

« L’être suprême des révolutionnaires de 1789 », le  Jéhovah  ou   Yahvé de qui Moise reçoit les tables de la Loi, Allah le Miséricordieux aux 99 noms en terre d’Islam,   le  Mahou de mes ancêtres toris,  aucune de ces appellations ne me distrait   du précieux don de la  foi exprimée dans ce credo désormais universel   que jamais  ni Luther ni Calvin n’ont  pensé renier ou altérer :  « Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, créateur… de l’univers visible et invisible… »   Qui  aime tous les hommes et ne veut en perdre aucun.

Alors, le10 janvier, au Benin, nous vivons la chance d’une réalité prophétique à sublimer : « Beaucoup viendront d’Orient et d’Occident et  prendront place avec Abraham, Isaac et Jacob… » Et…  avec Jésus ressuscité ! La foule innombrable des « chrétiens de culture « ou «  d’esprit », des « chretiens sans frontières » ou « en attente », adorateurs dispersés  que l’on ne peut compter, ceux de l’Apocalypse comme ceux d’au delà des fleuves de l’Ethiopie, cette foule bigarrée  se bouscule confusément pour apporter son  offrande. Comment  l’accueillir ? Telle apparait à nos yeux  la boussole de  la  mission qui s’annonce et qu’entrevoyaient déjà  des précurseurs comme Robert Sastre, Isidore de Souza ou Lucien Agboka.

Jean-Paul II et Benoit XVI au cours de leurs visites pastorales au Benin ont confirmé  et  conforté  notre espérance.

             Mettons- la donc en marche, la nouvelle évangélisation ! Clairement en vue, la moisson est immense …
                                                                                                          

 Albert TEVOEDJRE (Frère Melchior, sma)


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