Libérer la parole qui est en nous

« En Afrique, toute assemblée a ses lois, la palabre a les siennes ; elles sont simples. Chacun à son tour est invité à s’exprimer ; tous ont le devoir d’écouter jusqu’au bout, sans interrompre ; nul n’est laissé pour compte. Il n’est pas nécessaire qu’un jugement soit porté. Après avoir siégé, tous peuvent repartir en paix, un pas est franchi. »
Règle n°1 : liberté de propos
Règle n°2 : bienveillance, écoute et respect
Règle n°3 : égalité de tous devant la question humaine.
Autant de valeurs que je souhaite vous faire partager à travers ce blog et avec l’aide de toutes vos contributions !

mercredi 4 décembre 2013

Nous irons tous au paradis

Je termine la lecture de cet ouvrage à deux voix réalisé par deux auteurs dont la renommée n’est plus à faire mais dont on peut toujours vanter la rigueur scientifique autant pour l’un que pour l’autre.
Daniel Marguerat pasteur, chercheur en théologie biblique et, Marie Balmary psychanalyste traitent dans cet ouvrage d’un sujet, oh combien important, que nous appelions me semble-t-il « les fins dernières ».


Il s’agit bien selon ce qu’indique le sous-titre de visiter dans les Écritures « Le Jugement en question ». La rencontre pour l’éternité, de chacun de « Nous », et pas de « On », avec le Dieu de Jésus-Christ. Un Autre qui nous apprend  à vivre la divine miséricorde.

Chacun des auteurs, avec son « outil propre » l’exégèse biblique ou la psychanalyse, entraîne le lecteur dans une réflexion qui rejoint vraiment l’attente de l’homme d’aujourd’hui. Le message est découvert progressivement dans un langage clair et agréable. La réussite de la présentation tient, à mon sens, en la qualité de l’attention réciproque de chacun des auteurs à l’autre. L’Écoute de l’autre et de son point de vue.

Ensemble, en huit petits chapitres, ils entrent dans l’intelligence des Écritures, étudiant tout particulièrement le texte dit du « Jugement dernier » en Matthieu, donnant ensuite une grande place et une grande importance à la théologie de Jean et enfin à celle de Paul.

Deux brefs passages :
- par Daniel Marguerat chapitre V, Naissance du sujet : page 160.
« Le programme que déploie Jean est beau : pacifier le cœur. ‘‘Devant lui nous apaiserons notre cœur, car si notre cœur nous accuse, Dieu est plus grand que notre cœur et il discerne tout.’’ Notons que cet apaisement du cœur n’est pas acquis d’emblée ; il est une invitation à suivre : ‘‘nous apaiserons notre cœur’’. Pacifier est un travail, et il s’opère devant le Dieu qui éveille et stimule, par la Loi, notre engagement éthique. Face à la morsure du remords, ou au sentiment de la faute, face à l’impression d’en avoir fait trop ou trop peu, se dresse le ‘‘Dieu plus grand que notre cœur’’. Non pas pour plomber l’exigence, mais pour contrer le réquisitoire du cœur. ».
- par Marie Balmary chapitre VI,  Recherche du Jour : page 170. Fin du gendarme
    « Le souverain Juge, s’il est, est à chercher ailleurs. Évidence ? Sans doute, mais comme toutes ces choses qui, allant sans dire, vont beaucoup mieux en le disant. Il ne suffit pas d’être athée pour être tranquille, nous pouvons nous croire athées d’un dieu qui nous surveille et nous juge d’en haut. A tel moment de la vie, une épreuve, une rencontre, parfois même une parole peuvent faire réapparaître en chacun de nous cette divinité infantile » … «  allons-nous trouver le dieu qu’il vaut la peine de connaître, le juge que nous ne craindrions pas de rencontrer qui, loin de nous mettre en difficulté, nous atteste, nous mortels, comme reconnus divins, attendus ‘‘au paradis’’? »

Une conclusion assez originale dans laquelle je soulignerais le retour d’un dialogue entre les auteurs sur le thème de « la gloire et la honte » qui me suggère une ouverture en théologie au travail de réflexion que nous effectuons avec Benjamin Hegeman sur sa thèse en histoire de l’Église en pays Baatonu « Between Glory and Shame».

Michel Bonemaison Le Cendre mardi 26 novembre 2013.

lundi 21 octobre 2013

Le Christ Juif


Daniel BOYARIN
Le Christ Juif
À la recherche des origines
Cerf septembre 2013 190 pages 19€


Traduit de l’anglais (américain)
par Marc RASTOIN
avec la collaboration de Cécile RASTOIN
Préface du Cardinal Philippe BARBARIN

Voici un ouvrage que je classerais volontiers au registre des œuvres servant magistralement le dialogue entre Juifs et Chrétiens. Je préfère écrire ces quelques lignes en guise de témoignage plutôt que de prétendre à une recension, me situant davantage au niveau de l’affectif plus qu’à celui de l’analyse scientifique.

Tout au long de son étude l’auteur, rabbin américain, marque un très grand respect pour le mouvement chrétien né au sein du judaïsme ; s’il s’insurge souvent contre des propositions réductrices, il est honnête quant à sa vision sur la personne de Jésus : « Que l’on me permette d’être ici très clair : je ne nie aucunement la validité de la conception chrétienne de la question. Il s’agit certainement d’une matière de foi et non de recherche. Je la nie comme une explication historique, scientifique et critique. » Page 185 note 1.

Son projet est de reconnaître les caractéristiques d’un Messie annoncé au sein des Écritures : celui qui a reçu l’onction et que l’on nomme Christ. Pour ce faire, en quatre petits chapitres, il repère les traits communs à ce Christ annoncé et attendu et à ce Jésus qui, né dans ce contexte d’attente messianique, va être suivi par nombre de Juifs ses contemporains [et bien au-delà dans le temps et l’espace][1].

« Le Fils de l’homme » est une expression créée par Daniel en son chapitre 7 qui déjà 150 ans avant notre ère imagine un envoyé de Dieu venu de Dieu chez les hommes. Il est une « théophanie » manifestation de Dieu dans l’humanité alors que pour d’autres cet envoyé serait seulement un homme adopté par Dieu dans une « apothéose » [semblable à celle d’Elie ?]. Par sa théophanie Daniel rejoint en fait d’autres courants religieux bien concrets hors du judaïsme. Ce Messie est : roi humain, Rédempteur divin, en Jésus il est même maître du sabbat ; conceptions qui deviennent viables au sein du judaïsme. Et déjà apparaît la conception d’un Dieu à la fois Père et Fils.

Deux livres [accessibles dans la collection Bibliothèque de La Pléiade. La Bible. Écrits Intertestamentaires. Gallimard 1988] légèrement plus proches de nous au 1er siècle de notre ère, 1er Livre d’Hénoch et 4ème livre d’Esdras corroborent la christologie de Daniel. L’auteur s’appuie aussi sur un ouvrage à la source de nos évangiles appelé Marc, [Marc intermédiaire selon le Père Boismard, lui aussi chercheur des origines des écrits].

Une autre référence de la plus grande importance dans la vie d’un Juif, celle de la nourriture, c’est avec le chapitre 7 de l’évangile de Marc que D.BOYARIN s’applique à montrer un Jésus en totale conformité avec les coutumes religieuses de son milieu y compris la « cacherout » ; oui Jésus mangeait « casher » mais il manifestait son refus de lois tatillonnes  apportant la confusion, sans cesse mises en avant par un mouvement pharisien obnubilé par le pur et l’impur !

Pour finir, une autre notion commune au Judaïsme et au Christianisme, la figure d’un « Christ  Souffrant ». D. BOYARIN propose un midrash[2] sur Daniel  le mettant en lien avec les chapitres 8 et 9 de l’évangile de Marc à propos de l’humiliation du Fils de l’homme et de l’antériorité des Écritures à son sujet [à considérer comme annonces prophétiques]. L’une d’elle, majeure, est la référence au Serviteur Souffrant d’Isaïe.

Qu’en est-il alors de la divinité de Jésus de Nazareth ? Ce n’est pas le propos de notre auteur, il laisse aux chrétiens, dont je suis, de répondre au nom de leur foi. Aussi cet ouvrage me met en piste pour étudier une autre de ses œuvres parue en français, en juin 2011, relatant le parcours vécu par les chrétiens d’origine juive au sein du judaïsme, en toute harmonie, jusqu’à la rupture marquée par le Concile de Nicée [La partition du judaïsme et du christianisme. Cerf. Patrimoine, judaïsme. 447 pages. 48€].

Michel Bonemaison sma
21 octobre 2013.

NB. voir aussi la recension dans Études de octobre 2013 faite par Anne-Catherine Baudoin page 428.


[1] Ce que je mets entre crochets est ma propre appréciation au-delà de l’écriture de l’auteur.
[2] À plusieurs reprises l’auteur invite ses lecteurs à lire les Évangiles comme des midrashim chrétiens, le midrash étant un genre littéraire propre au rabbinisme, ce en quoi il honore à nouveau la valeur des documents de la mouvance chrétienne.

RÊVER l’Église catholique



RÊVER l’Église catholique.
Michel QUESNEL.
DDB  152 pages  -  15€.

Ce bibliste de renom ajoute sa voix à celles nombreuses, qui appellent actuellement l’Église à un changement en profondeur pour être fidèle à l’esprit du concile Vatican II et à l’Évangile.

S’il ne mâche pas ses mots, pour dire ce qui ne va pas dans l’Église catholique romaine d’aujourd’hui (immobile, crispée, insuffisamment ouverte, coupée de la société, etc.) c’est pour mieux souligner son besoin urgent de réforme. Ce livre est en fait un superbe plaidoyer en faveur du christianisme, de son actualité et de la pertinence de son message pour le monde d’aujourd’hui.

La première partie présente le trésor du christianisme qui n’attend qu’à être offert aux hommes et aux femmes de ce temps. La deuxième partie est le rêve de Michel Quesnel qui, fort de ce qu’il vient de dire de positif sur le christianisme, envisage ce que serait une Église qui révèlerait ce trésor dont elle est porteuse.

Le ton, ni aigri, ni désespérant, est au contraire plein d’espérance, et ce qu’il rêve n’est pas du tout impossible à envisager … d’autant plus qu’un nouveau Pape vient d’arriver au Vatican et peut être synonyme de changements possibles. Michel Quesnel fait partie de ces prophètes qui voient loin, et qui nous permettent d’espérer en temps de crise. Merci à lui pour ce livre qui fait du bien.

P. Gilles Brocard
Nouvel Essor n°252
Septembre 2013 p 29

Sur la terre comme au ciel


Sur la terre comme au ciel
Jorge Mario BERGOGLIO & Abraham SKORKA

Robert Laffont 2013, p 239.  16 € 90.

Ce livre est précieux dans la mesure où il montre que le cardinal Bergoglio, devenu pape François, et le rabbin Abraham Skorka se sont retrouvés un bon nombre de fois à Buenos Aires et sont devenus de fervents artisans du dialogue interreligieux avec ce que cela suppose de l’autre, d’humilité profonde et de compréhension de la nécessité du dialogue entre religions dans le contexte de la modernité.

Le vrai dialogue exige que l’on s’efforce de connaître son interlocuteur et de le comprendre. « Les mots, précise le rabbin, ne sont que des véhicules de communication dont le sens n’est pas toujours le même, y compris pour les membres d’une société qui parlent la même langue ». « Avec Skorka, ajoute le futur pape, je n’ai pas eu à défendre mon identité catholique, pas plus qu’il n’a eu à défendre sa judéité … »

Le défi consistait à cheminer avec respect et affection, cheminer en présence de Dieu en tâchant d’être irréprochables. Il y est question d’athéisme et d’agnosticisme, du diable et de la sainteté, de la prière, de l’avortement, du divorce, du mariage entre personnes de même sexe, de la politique passée et présente des pouvoirs en place, de l’argent et de la pauvreté et de bien d’autres thèmes qui viennent à l’esprit de deux interlocuteurs forts d’une longue expérience, pétris de simplicité et aux antipodes de toute mondanité.

Ce livre est à regarder de près pour mieux connaître les positions jugées « dures » du nouvel évêque de Rome et qui, de façon inéluctable, vont émerger dans les débats et au cours des prochains mois. Au terme de l’ouvrage, Jorge Bergoglio parle de l’évangélisation qu’il juge essentielle mais qui ne doit pas verser dans le prosélytisme. L’attraction qu’elle exerce, précise-t-il, ne doit opérer qu’à travers le témoignage.

Henri Madelin
Études p 285-6.
septembre 2013

dimanche 1 septembre 2013

Pâque 2013


Signes de morts, signes de Vie.

Pâque signifie pour moi la vie, et même la plénitude de la vie.
Quand je pense à ce don extraordinaire qu’est la famille, ce lieu merveilleux où la vie nous est donnée, ce contexte extraordinaire qui permet à la vie de grandir, de s’épanouir. Mais, pas sans mal! Aujourd’hui la famille elle-même est mise à mal.

Qu’en est-il de l’enfant et de son devenir ? Qui éduque le petit, lui transmet l’esprit de famille, en quelle histoire est-il introduit et comment est-il préparé à la prolonger ?

Que de fragilités chez le jeune scolarisé: des parents tout entier voués à leur gagne-pain et des enfants laissés à eux-mêmes à la sortie de l’école, pendant les vacances scolaires. Enfants sans éducateurs, « troupeau sans pasteur », les voilà en petites meutes bien sympathiques mais, désœuvrées!

Quant à ceux des adolescents qui s’adonnent au tabac, à la drogue, traqués par les services de sécurité et qui se cachent ; bien heureux quand ils ne sont pas récupérés et manipulés! « Une nuit de Noël un quartier sans lampadaires n’a-t-il pas été illuminé par les voitures incendiées ? »

Quelle réflexion mettre en oeuvre pour aujourd’hui? Avec qui, pour aboutir à une concertation avec la société civile ? Je crois fermement en la réhabilitation de ces jeunes. Des éducateurs de proximité, des Guy Gilbert, une ferme volonté de nous mettre ensemble pour redonner la vie.

Quittons nos peurs, tendons la main à la vie qui monte. Regardons, nombreux sont les jeunes qui se prennent en charge, se construisent et nous annoncent une société belle et vivante.

Christ Ressuscité est don de vie. Offrons à tous l’envie de vivre.

Michel Bonemaison
Pâque 2013 à Le Cendre
Fond commun Clermont

lundi 18 mars 2013

L’esprit de Tibhirine

Frère Jean-Pierre et Nicolas Ballet

L’esprit de Tibhirine

Le témoignage
du dernier survivant

Seuil
Septembre 2012
213 pages.


Je ne peux qu’exprmier mon admiration à la lecture du témoignage de Frère Jean-Pierre.
A l’heure où des amalgames destructeurs courent dans tous les sens, et beaucoup trop sur la toile, je retiens particulièrement ce qui est écrit dans son dernier chapitre, le cinquième, intitulé “l’avenir de l’esprit de Tibhitrine”.

Je le livre sans rien ajouter sinon mon invitation à méditer ce chef-d’oeuvre, ce bel ouvrage sur la spiritualité du dialogue déjà existant.

Page 196 et 197 «… S’il faut être fort, c’est dans le dialogue, avec la volonté de découvrir ce qui est beau en notre prochain, pour provoquer, en réciproque, sa curiosité. C’est un travail exigeant. Nous devons accepter d’être perdants d’avance, comme le Christ. Il faut être fidèle à Son exemple. Les résultats, il les espère pour après : « Si le grain ne meurt pas en terre, il ne porte pas de fruits. » Les chances de réussir sont plus élevées en tentant d’entreprendre quelque chose, avec l’aide de l’esprit Saint, qu’en restant les bras croisés à maugréer sur les défauts supposés de l’autre. Est-on sûr d’avoir toujours eu le courage d’entamer l’échange ? D’être toujours prêt à lier conversation avec bienveillance, sans à priori ? Il faut tenter la rencontre, sans la forcer, et sans en avoir peur. »

Michel Bonemaison
Le Cendre 1 mars 2013

Un visite au Musée Africain

Une visite au Musée Africain
MARS 2006 L’appel de l’Afrique (21)

La description de cette statuette inaugure une rubrique entièrement dédiée aux oeuvres du musée africain. Elle vous permettra de découvrir les richesses que recèle la maison et, pourquoi pas, de franchir la porte de ce musée. Un concentré d’Afrique en perspective…


Description de l'objet :

- Statue abron-kolango, Nord-Est de Côte d'Ivoire.
- hauteur 29,7 cm
- largeur 9,2 cm
- poids 615 grammes
- sculpture en bois massif, polychrome (jaune, rose, rouge)
- bijoux en laiton, perle et corde.





Assise sur une chaise de style occidental, une femme africaine, drapée d'un pagne jaune sans pli, semble vouloir exprimer, avec majesté, un message qui l'habite et la dépasse.
PAUMES OUVERTES, LES MAINS PROLONGENT LE MOUVEMENT QU'INAUGURENT LES BRAS DEPUIS LE BUSTE JUSQU'AUX GENOUX, ÉVOQUANT LA MERVEILLE DU SEIN MATERNEL. La fécondité confiée à la femme est en oeuvre dans le sein de ce personnage. En conjuguant cette dynamique des mains avec la symbolique habituelle des seins qui allaitent, ici mise en évidence par le soutien-gorge rose, le message apparaît admirablement au regard : "la vie est là".
Et son visage d'inviter à la suivre ! Elle accompagne celui qui, comme par magie, veut bien se laisser guider en pensée, un oeil vers le sein maternel et l'autre tourné vers la source de la vie.
Une sculpture de ce type est un chef-d'oeuvre dans sa forme ainsi que par la capacité à délivrer un élément de Sagesse, celui du thème de la fécondité. Transmettre la vie est un gage de fidélité aux ancêtres et à l'Altérité divine.
Chaque peuple proclame à sa manière des valeurs qui ont cette dimension de l'universel. 
Ce chef-d'oeuvre Akan ne peut-il pas évoquer
"LES VIERGES EN MAJESTÉ" de l'occident chrétien ?
Par des représentations de même qualité un message ne peut-il pas en relayer un autre ?
Comment ne pas imaginer un dialogue qui partant de la participation de la femme au don de la vie pourrait permettre de se mettre à l'écoute de celui que Dieu donne par Marie ?

"Transmettre la vie est un gage de fidélité aux ancêtres et à l'Altérité divine."

lundi 4 février 2013

Foi et solidarité

Institut de Théologie d'Auvergne
Module : Foi et solidarité.
Première soirée :
Des mots pour partager ce qu’on essaie de vivre au plan de la solidarité.
mardi 11 décembre 2012 de 20 heures à 22 heures à l’ITA., Caroline Bauer – Christian Pian.
Deuxième soirée :
mardi 22 janvier 2013 20 heures à 22 heures à l’ITA., Caroline Bauer – Michel Bonemaison.
Quels aspects de notre foi sont impliqués dans le souci de la solidarité ?
Troisième soirée : sous forme de forum
mardi 5 février 2013 19 heures à 22 heures à l’ITA., Caroline Bauer - Christian Pian.
Pour aller plus loin dans la solidarité en lien avec notre foi sur le terrain.
* * * * *
Quels aspects de notre foi sont impliqués dans le souci de la solidarité ?

1. L’un ou l’autre aspect de la foi :

Puisque nous parlons de l’implication de notre foi dans le souci de la solidarité il me paraît important de m’arrêter d’abord sur une définition de ce que nous appelons la foi. À mon sens il s’agirait d’une adhésion, et il importe de savoir qui donne son adhésion à qui, à quoi et dans quel but.

Nous situant dans un contexte chrétien et en tenant compte de nos racines hébraïques, j’aime souligner que le terme AMEN affirme l’adhésion de tout un peuple à l’un ou l’autre aspect d’une dimension spirituelle, après avoir entendu la proclamation d’un message.

Dans l’histoire d’Israël ce terme FOI est indiqué par une multitude d’expériences et il recouvre des attitudes nombreuses telles que la solidité, la sûreté, la confiance, l’espérance, l’attente, la protection etc. Chacune est une mise en route à la suite d’un message délivré par Dieu, le Dieu d’Israël.
Nous pourrions dire ainsi que la foi exprime une réponse de l’homme quand Dieu l’interpelle, quand Dieu se fait connaître.

Lorsque les auteurs du Nouveau Testament expriment l’adhésion à Jésus le Christ, ils utilisent un mot grec : PISTIS qui selon une évolution linguistique est à la racine du mot foi. Lorsque dans une rencontre personnelle Jésus dit à l’un de ses interlocuteurs « ta foi t’a sauvé » il peut s’agir de deux niveaux différents de la foi.
La personne peut simplement se référer à ce Jésus qui humainement lui paraît aller au-delà de ses espérances,
ou bien, en réalisant comme les évangélistes une lecture post Pascale, la personne peut accéder avec le Ressuscité à une réalité qui vient de Dieu.

Ainsi
la démarche de foi peut être motivée par une adhésion tout humaine, adhésion qui comporte déjà une marche en avant, une sortie de soi qui permet de réaliser un projet plus grand que soi.
La démarche de foi peut aussi être motivée par une adhésion spirituelle qui, elle aussi, comporte une marche en avant, une sortie de soi permettant de réaliser un projet en accord avec celui que nous suivons, avec celui en qui nous adhérons et qui, en l’occurrence, est Dieu.

Ce préambule me permet de souligner que, quel que soit le niveau d’adhésion, la solidarité vécue sera effectivement de qualité puisqu’il s’agira toujours d’une sortie de nous-mêmes au service d’autrui. Ainsi, autrui peut être simplement l’autre, ou bien, il peut devenir le frère ; mais notre solidarité représente le même service, engage autant d’amour, nécessite autant de respect à l’égard de l’autre.

Puisque nous ne sommes ni les seuls ni les premiers à vivre la solidarité au service de l’autre, mais que nous pouvons la vivre en référence à notre foi chrétienne, je propose que dans un premier temps nous allions voir du côté de Jésus.
- Comment Jésus vit-il la solidarité avec les humains ses frères qui, par lui, sont les fils du Père ?
- Ensuite nous pourrions simplement nous remémorer quelques noms parmi ceux de nos contemporains qui ont marqué notre époque par la qualité de leur solidarité.

2. Jésus ou, selon les évangiles, la solidarité à la manière de Dieu:

Notre lecture de quelques passages d’Évangile a pour but de bien faire ressortir le thème d’aujourd’hui « quels aspects de notre foi sont impliqués dans le souci de la solidarité ? ».

A – Le bon Samaritain: Luc 10,15 – 37.

La parabole racontée par Jésus a pour objet le comportement proposé « afin d’hériter de la vie éternelle ». Ce comportement est un des éléments de notre adhésion à Jésus: il met en oeuvre chez nous le sens de la fraternité qui, vécue, est vraiment une solidarité, solidarité motivée par notre regard vers Dieu.

La parabole met en scène des hommes que seul définit leur rôle social ou religieux : des brigands, un aubergiste qui sont chez eux, sur cette route ; un prêtre et un lévite de passage, et un Samaritain en voyage. Aux yeux du judaïsme ce Samaritain est un hérétique, réellement un étranger. Il est vraiment à l’opposé du prêtre et du lévite qui, eux, sont deux honorables serviteurs du Temple. Remarquons bien, avec insistance, que l’être humain à demi mort n’a strictement aucune identité sociale ; on ignore même son origine. Ainsi pour Jésus celui dont on aura à se faire le prochain est en vérité Monsieur tout le monde.

Chacun des passants voit le blessé. Chacun a un mobile personnel à son attitude profonde. Dépassant tous les tabous, l’un d’eux ressent une compassion viscérale (« il le vit et fut saisi de pitié ») qui le conduit à se mettre au service du blessé : – il s’approche – il pense ses plaies – il y verse de l’huile et du vin – puis il le charge sur sa propre monture – le conduit dans une auberge – et prend soin de lui. Mais ce n’est pas tout, il le confie à un autre, l’invitant à être solidaire avec lui.

C’est de cette manière que notre homme, Samaritain, obéit à la tradition juive qui valorise l’amour d’autrui en le mettant au niveau de l’amour de Dieu. La question posée à Jésus, celle qui a suscité cette parabole était : « Que dois-je faire pour avoir part à la vie éternelle ? » Par son attitude le Samaritain hérite de la plénitude de la vie, fruit d’une foi active, adhésion à la volonté divine.

Pour souligner « la bonté », l’aspect de notre foi mis en valeur par cette parabole, retenons le dialogue final entre Jésus et le docteur de la loi :
– Qui a été le prochain de l’homme tombé entre les mains des bandits ?
– Celui qui a fait preuve de bonté envers lui.
– Va et, toi aussi, fait de même.

B – Matthieu 25, 31 – 46. « Le jugement dernier ».

Au début de l’Évangile de Matthieu (7,12) Jésus conclut le Sermon sur la montagne par ce qu’il est coutume d’appeler la « règle d’or » :
« ... Tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux, vous aussi, voilà ce que dit toute l’Ecriture : la loi et les prophètes. »

Ainsi la foi chrétienne est un agir qui se résume dans l’amour du prochain ; ceux qui ont aimé sont appelés les « bénis de mon Père ». À l’égard de qui ces bénis ont-ils réellement exercé leur amour ? Écoutons l’énumération des actes de charité déjà vécus dans le monde juif comme une imitation méritoire de la conduite de Dieu : il faut nourrir l’affamé parce que Dieu s’y emploie, prenant fait et cause pour le malheureux ; se désolidariser de ce dernier, c’est désavouer la cause de Dieu.
D’où ce beau commentaire juif ancien sur Isaï 58 : « Si vous avez nourri les pauvres, dit le Seigneur, je vous compterai comme si c’était à moi que vous l’aviez fait. »

Ainsi en Matthieu 25,35 – 36 :
j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ;
j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ;
j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ;
j’étais nu, et vous m’avez habillé ;
j’étais malade et vous m’avez visité ;
j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi !

Pour conclure: «… selon l’évangéliste, on sert le pauvre pour lui-même, dans une obéissance sans calcul aux préceptes de l’amour du prochain. Dans ce désintéressement se révèle alors une convergence dans l’amour que portent aux pauvres et le disciple et le Christ : ce dernier s’en trouve pleinement honoré, honoré aussi le Dieu qui a pris fait et cause pour les malheureux. » (Claude Tassin )

C – La prière sacerdotale : Jean 17,I – 26.

Un autre aspect de la solidarité est la prière. Le chrétien, à l’imitation de Jésus, va porter vers le Père l’intention de ceux qu’il veut servir. C’est ainsi que nous pouvons entendre avec profit la manière dont Jésus parle au Père au sujet de ses amis:
« Père… Je prie pour eux… ceux que tu m’as donnés : ils sont à toi,… et je trouve ma gloire en eux. … Père Saint, ... garde mes disciples dans la fidélité à ton nom… pour qu’ils soient un… Je parle ainsi… pour qu’ils aient en eux ma joie, et qu’ils en soient comblés.… Je demande que tu les gardes du Mauvais.… Consacre-les par la vérité : ta parole est vérité. … Et pour eux je me consacre moi-même, afin qu’il soient, eux aussi, consacrés par la vérité. »

Le premier aspect de l’attitude de Jésus est son total désintéressement: il confie les disciples au Père. De ce lien seul il tire sa propre gloire. Il fait de ses disciples les destinataires de sa joie, il souhaite qu’ils en soient comblés. Il prie pour qu’ils soient gardés du Mauvais et qu’il soient consacrés dans la parole de vérité. Dans cette prière toute l’attention de Jésus est au seul service de ses disciples. À nous de vivre le même désintéressement.

D – les sommaires des actes

2,42 « ils étaient assidus à l’enseignement des apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. »
20,7 « le premier jour de la semaine, alors que nous étions réunis pour rompre le pain, Paul ... adressait la parole aux frères ... »
Pour un chrétien la solidarité à l’égard des hommes ne peut que s’enraciner dans l’assiduité à trois niveaux : la fréquentation des Ecritures, le sens et la pratique de la communauté fraternelle, ainsi que la rencontre régulière avec Dieu en Christ.

E – le Christ qui remet debout dans les rencontres

Jésus lui-même est un modèle d’assiduité, de constance. Pratiquement toutes ses rencontres, il les vit avec ses disciples pour les éduquer; toutes ses rencontres en solidarité avec les humains sont précédées de sa prière au Père. Ces hommes et ces femmes au-devant de qui il va ou qu’il accueille, quels que soient leurs difficultés, leurs limites, leur handicap, et il les respecte au point qu’ils repartent différents de ce qu’ils étaient à leur arrivée. Grâce à lui ils sont désormais des hommes debout.

Ainsi pour nous, une foi qui agit met en œuvre ce qui permet à chacun de ceux que nous rencontrons de repartir dans la vie.

F – la perspective des cieux nouveaux et d’une terre nouvelle

Ce renouvellement de l’un et l’autre, vécu grâce à la solidarité ancrée dans la foi en Christ Jésus, est le prémisse du renouvellement annoncé dans l’Apocalypse 21 : « la Jérusalem nouvelle descend du ciel… – Je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle… – Et celui qui siégeait sur le trône dit : Voici, je fais toute chose nouvelle. »

Ainsi dans la continuité de l’histoire d’Israël, notre espérance est ancrée sur la solidité la continuité, la confiance, l’attente, la certitude.

3. Quelques figures contemporaines:

Parmi la foule de tous ceux qui sont attentifs à l’autre comme un frère nous pouvons évoquer les figures bien connues auxquelles ont l’habitude de se référer bien des émules :
•    Monsieur Vincent au service des malades et des isolés
•    Jean-Marie Vianney et son accueil des pêcheurs
•    Jean Rodin et son amour pour les petits et les déshérités
•    Dom Camara et sa lutte contre les injustices sociales
•    Guy Gilbert éducateur et compagnon des loubards
•    l’Abbé Pierre et les chiffonniers d’Emmaüs
•    tant d’autres fondateurs et tous les membres des mouvements d’ATD quart monde de l’ACAT, du service des migrants, des maraudes, etc.

Jean Rodin écrivait : « La spiritualité de Saint-Vincent-de-Paul est faite de ses oraisons d’abord, mais aussi de tout ce que le Christ  lui a murmuré à travers les misères approchées. Le père de Foucault a connu le cœur du Christ en le fréquentant non seulement dans le silence du tabernacle et aussi dans les soins donnés aux touaregs malades. »
Ou encore pour parler de l’urgence de la solidarité : « Notre Seigneur a parlé d’une hôtellerie comme complément, et non comme suppression de la sollicitude du Samaritain. »
Ou bien insistant sur l’universalité de l’appel : « Le Seigneur n’a pas jugé essentiel de savoir quelle était la profession de ce Samaritain, s’il allait régulièrement au Temple, quelles étaient ses opinions politiques, quelle était sa situation matrimoniale… Ce Samaritain a su voir son frère souffrant au bord de la route, ce Samaritain a su prendre le temps de le soigner et de le conduire à l’hôtellerie. Le Seigneur n’a pas fixé d’autres conditions pour ce cas exemplaire. »

Et pour terminer je citerai avec humour le même Jean Rodin : « il n’est pas interdit à la charité d’être intelligente. »
Michel Bonemaison 22 janvier 2013.